Le bilan 2024 de la Fédération des Assureurs est clair : les Français vivent désormais dans la « société du risque ». Et une majorité craint de ne plus pouvoir s’assurer à l’avenir face aux risques climatiques, de cybercriminalité ou de dépendance liée à l’âge. Mais c’est le coût croissant des catastrophes naturelles qui poussent le secteur de l’assurance à tirer la sonnette d’alarme sur l’urgent besoin de prévention et de prise de conscience collective.
Une facture climatique de 5 milliards d’euros en 2024
Lors d’une conférence de presse le mois dernier, la Fédération des assureurs, France Assureurs, a présenté son bilan 2024.
Concernant le climat, sa présidente a révélé que les événements climatiques en 2024 ont coûté 5 milliards d’euros aux compagnies d’assurances en France.
Entre 1982 et 1989, soit la période suivant la création du régime des catastrophes naturelles, la moyenne annuelle était de 1,5 milliard. Mais depuis, les choses se sont aggravées. Sur la période 2020-2024, la moyenne annuelle s’est élevée à 5,6 milliards d’euros d’indemnisations.
Avec des aléas plus fréquents et plus intenses, le secteur de l’assurance doit faire face à une évolution structurelle inquiétante.
Pour rentrer dans le détail de 2024, la répartition est la suivante :
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2,2 milliards d’euros concernent la couverture dommage classique pour les tempêtes, grêles et chutes de neige ;
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2 milliards d’euros relèvent du domaine des catastrophes naturelles (inondations, sécheresses), indemnisées par le régime « cat-nat » ;
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800 millions d’euros concernent les pertes agricoles climatiques couvertes par l’assurance récolte.
Les tempêtes Kirk et Leslie d’octobre 2024 ont coûté 785 millions d’euros de dommages. Et les inondations dans le Nord et le Pas-de-Calais, entre novembre 2023 et janvier 2024, sont évaluées à 430 millions d’euros.
L’Océan Indien, de son côté, a reçu trois cyclones : Belal, puis Garance à La Réunion, et Chido à Mayotte. Leur coût cumulé frôle le milliard d’euros, dont la moitié pour le cyclone Chido à lui seul.
Dégâts des eaux et retrait-gonflement des argiles
D’un côté, 2024 est l’année la plus chaude jamais enregistrée dans le monde. De l’autre, c’est l’année la plus pluvieuse et la moins ensoleillée depuis plus de 20 ans en métropole. Résultat : les assureurs constatent en 2024 une hausse de 12 % de la fréquence des dégâts des eaux.
Les indemnisations de dégâts des eaux sont ainsi devenues le premier poste de sinistre en assurance habitation. La hausse de la fréquence et du coût moyen des sinistres les a fait augmenter de 134 % en 20 ans. Au total, on évalue à 10 milliards les pertes assurantielles l’année dernière à cause des inondations en Europe.
Dans cette explosion des coûts des dégâts des eaux, les collectivités territoriales se sont, d’une certaine façon, fait piéger à leur propre jeu. Par électoralisme, elles laissent en effet construire en zone inondable. Et elles permettent aussi à l’agriculture industrielle de détruire les haies qui régulent la circulation de l’eau.
Entre 1982 et 2023, chaque année, près de 6 000 communes en moyenne font l’objet d’une reconnaissance d’état de catastrophe naturelle. Et on ne parle pas là des dégâts des eaux, qui ne relèvent pas du régime cat nat. C’est une garantie standard de contrats d’assurances que les collectivités ont de plus en plus de mal à signer avec les assureurs, sans démontrer leurs efforts concernant les zones à risques.
Conséquence de ces forts excédents de pluviométrie, France Assureurs prévient qu’en cas de sécheresse importante cet été, existe un risque fort de retrait-gonflement des argiles. Son coût pourrait être difficilement supportable par le secteur de l’assurance.
Voir à ce sujet notre article « Sécheresse – Inondation : le couple qui fait craquer ! »
L’assurance, lanceur d’alerte ?
Les projections climatiques de France Assureurs montrent donc une accélération plus rapide que prévu de la sinistralité. Sur la période 2020-2023, le coût réel des sinistres climatiques dépasse de 18 % les projections de départ pour 2050 ! Nous sommes donc déjà dans le futur.
L’estimation des coûts cumulés des événements climatiques pour 2050 frôle les 143 milliards d’euros, soit le double du coût enregistré entre 1989 et 2019.
Le problème, c’est que cette intensification rapide des sinistres climatiques est devenue imprévisible. Or, le modèle économique de l’assurance est basé sur la probabilité du risque à supporter. C’est elle qui permet de fixer à l’avance le montant des primes, et sert de base à la mutualisation.
Avec ce rapport sur 2024, France Assureurs lance, en quelque sorte, un avertissement. Existe aujourd’hui un danger imminent de décrochage du monde de l’assurance dans sa capacité à absorber cette évolution dramatique des coûts climatiques. Il est urgent d’accentuer la politique de prévention et la sensibilisation.
Aux États-Unis, un rapport du Sénat sur l’inassurabilité parle même de crash systémique qui guette du fait des événements climatiques.
Sans prise de conscience rapide de nos concitoyens sur l’urgence de modifier notre façon de vivre, de nombreuses zones à risques s’exposent à ne plus pouvoir être assurées, ou alors à un prix insupportable pour les ménages les plus vulnérables. Ce serait la fin de la mutualisation.
Lire le rapport 2024 de France Assureurs.
Les conseillers du Groupe Gesco Assurances sont à votre disposition pour vérifier votre niveau de couverture face aux événements climatiques.